Deux
physiciens de renom : Jacques Blamont et François Roddier
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Jacques Blamont est né le 13 octobre 1926. Il est
agrégé de sciences physiques, membre de l'Académie des
sciences de France, des Etats-Unis et de l'Inde, Professeur
émérite à l'université Pierre et Marie Curie. Il a été
responsable de la mise au point des premiers satellites
français et il a conçu l'installation de la base de
Kourou en Guyane dès 1962. Il est actuellement conseiller
du président du centre national d'études spatiales (CNES)
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François Roddier, né en
1936 à Paris, est un physicien et un astronome. Il est entré
au CNRS dans la section Sciences de l'Univers où il a préparé sa thèse de
doctorat sous la direction de Jacques Blamont et avec lequel il a ensuite participé
à la première expérience spatiale européenne, un tir de fusées
"Véronique", au Sahara. Il part aux Etats-Unis en 1984 où il
participe au développement de l’optique adaptative. Il prend sa retraite en
décembre 2000 et revient vivre en France. Il s'intéresse aux aspects
thermodynamiques de l'évolution.
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1.
Jacques Blamont souligne au début de son nouveau livre "L’ACTION SŒUR DU REVE", paru le 20
juin 2012, que le tourisme
est devenu la première industrie mondiale, que 600 millions de touristes ont été comptabilisés en 2002, qu’un milliard 600 millions sont prévus
pour 2020. Il note avec perspicacité que le
seul désir de quitter sa chambre contribue au pillage des ressources naturelles par l’homme, citant la
phrase de Pascal à laquelle fait écho celle de Jean Giono.
Pascal [mathématicien, physicien et
philosophe français (1623-1662)] : "Tout le malheur de l’homme
vient de ce qu’il ne peut rester en repos entre ses quatre murs."
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Jean Giono [écrivain, voyageur immobile à Manosque (30 mars
1895 - 9 octobre 1970)] :
"Mon bonheur est entre
quatre murs." N.B. : Giono n’a que très rarement quitté sa ville
natale.
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2-Il estime avec gravité, voire avec terreur, que
trois menaces pèsent sur le XXIe siècle :
a-L'épuisement des ressources naturelles, consécutif à
la surpopulation et au pillage de la terre b-L'expansion
d'épidémies, favorisées par la mondialisation c-Les conflits
armés, dans la perspective inévitable d'un recours aux armes de
destruction massive.
3- François Roddier aborde les graves problèmes
de notre époque par une science ée au XIXe siècle, la thermodynamique,
qui, avec ses 3 Lois implacables, permet de comprendre l'évolution La
première Loi nous enseigne que l'énergie se conserve ; la deuxième
Loi, que l'énergie se dégrade en chaleur, se dissipe ; la
troisième loi, que les systèmes ouverts, pourvus d'un "flux
permanent d'énergie" appelés les" systèmes dissipatifs",
s'auto-organisent, dissipent l'énergie le plus vite possible en
la transformant en chaleur, modifient leur environnement, tentent
de s'adapter... jusqu'à leur extinction. Ainsi, dans la course
entre une proie et un prédateur, plus vite un être vivant évolue,
plus vite il accroît sa dissipation d'énergie, plus vite il modifie
son environnement, donc plus vite il doit évoluer. Il arrive un
moment où, le temps d'adaptation des gènes étant fini, une espèce
n'a plus le temps de s'adapter et s'éteint. Le processus
est illustré dans les travaux du biologiste Leigh van Valen qui
a baptisé "effet de la reine rouge" le phénomène
d'extinction des espèces.
Le
syndrome de la Reine rouge
d'après
le livre de Lewis Carroll (1832-1898) "De l'autre côté du miroir
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Chapitre 2, "Le jardin des
fleurs vivantes", pages 30 et 31 : La Reine rouge se mit à
courir si vite qu’Alice avait du mal à rester à sa hauteur. Lorsqu’elles
s’arrêtèrent toutes deux après leur course effrénée, Alice, épuisée, regarda
autour d’elle avec surprise et dit: "J’ai bien l’impression que nous n’avons pas bougé de cet arbre. Tout
est exactement comme c’était." A quoi la Reine répondit :
"En fait, ici, vois-tu, il faut courir autant qu’on le peut pour
rester au même endroit. "
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4. François Roddier estime que
les pays
développés, où le "flux permanent d’énergie" a augmenté
vertigineusement depuis l’utilisation industrielle du charbon, du pétrole, du
gaz, du nucléaire, offrent eux-mêmes, un
exemple parfait, jusqu’à la caricature, d’une société soumise à l’effet de la reine rouge. Ceux qui ont
du travail courent pour ne pas le perdre. Ceux qui n’en n’ont pas courent
pour en trouver. On cherche à "gagner" du temps. On se contente de
"fast-food". On utilise la voiture pour le moindre déplacement, on
prend l’autoroute, le train à grande vitesse, l’avion… Une telle société voit
son environnement changer de plus en plus vite, est contrainte d’évoluer de
plus en plus rapidement, a de plus en plus de difficultés pour s’adapter, risque
de s’effondrer extrêmement vite.
5.
Face
aux constats dramatiques qu’énoncent
les deux scientifiques, Jacques Blamont
estime de son côté que nos concepts actuels sont inopérants et qu’une
nouvelle éthique est indispensable. Parmi les trois modes d’action
possibles, un seul selon lui, l’homme athée, peut être opérant, le dernier:
5.1.
L’emploi de la technologie et de la science pour réduire ou supprimer les
pénuries : Toute progression de la technique entrainera l’amplification de
la consommation qui augmentera encore davantage les ponctions sur les
ressources naturelles disponibles,
5.2. L’action politique sous
forme de l’établissement d’une gouvernance internationale confiée aux Etats
fédérés dans l’ONU : Comme on l’a vu pour le climat, rien n’est négociable
pour les Etats,
5.3. L’appel au "spirituel", la seule voie laissant
espérer une modification généralisée des comportements et permettant de déclencher
un changement de paradigme vers celui de la frugalité : Seule
l’Eglise romaine possède le magistère moral et la structure qui rendent possible
une action sur l’ensemble des peuples écrit-il. Mais, selon le cardinal
Carlo Maria Martini, l’Eglise a toutefois 200 ans de retard ; aussi
doit-elle se réveiller vite et prendre la voie radicale du changement… Espérons-le !
6.
Jacques Blamont a réalisé une dizaine d’entretiens sur ces
questions, avec Jacques
Arnould, ingénieur agronome, prieur d’une communauté religieuse, chargé des
questions éthiques au CNES (Centre National d’Etudes Spatiales), qui ont été rassemblés
dans un livre paru en août 2009, "Lève-toi
et marche-Propositions pour un futur
de l’humanité" (1), aux Editions Odile Jacob. Aussi, dès maintenant, levons-nous et marchons fermement vers une
sobriété heureuse.
Léon-Etienne CREMILLE le 14
septembre 2012
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