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HOMMAGE À NOS MORTS, À PAUL VIRILIO, UN HOMME VISIONNAIRE DÉCÉDÉ EN SEPTEMBRE, INVENTEUR DE LA DROMOSPHÈRE

 

Paul Virilio, né le 4 janvier 1932, est mort le 10 septembre 2018. Il fût d’abord maître-verrier après l’acquisition d’une formation à l’Ecole des métiers d’art à Paris. Il collabora sur les vitraux de la chapelle du Rosaire à Vence (06) avec Henri Matisse, de l’église de Varengeville (76) avec Georges Braque, de l’église St Nicolas de Oye-et-Pallet (25) avec Serge Rezvani.

Les vitraux classiques, en verre et plomb, de l’église St Nicolas à Oye-et-Pallet (Doubs), vue ici avec son Cimetière, ont été dessinés par Serge Rezvani et exécutés par Paul Virilio

Paul Virilio suivit aussi les cours de Vladimir Jankélévitch et de Raymond Aron à la Sorbonne. Il fût plus tard architecte et urbaniste. Il devint également sociologue et philosophe à force de penser inlassablement la vitesse. Il a publié plus d’une trentaine d’essais depuis 1975 et collaboré à de nombreuses revues. Il est connu pour ses réflexions sur la vitesse et la technologie dont il perçut
l’alliance et qui
constitua à ses yeux ce qu’il a appelé une « dromosphère » (du grec dromos : course). En 1977, son ouvrage, "Vitesse et Politique", connaît un grand retentissement. "Emportés par la vitesse, nous ne voyons plus que devant nous, et encore pas très loin ! Il faut aller plus lentement, dans une société complexe, pour regarder sur les côtés, faire des liens". Il a étudié la façon dont la technocratie tend à cacher les risques inhérents aux nouvelles technologies. En 2011, il dénonce la tyrannie de l’immédiateté, de l’instantanéité, induite par les nouveaux réseaux de transmission et présente dans la mondialisation. "Nous vivons dans l’instant et non dans le présent. La domination de l’instantané, de l’immédiateté, nie le projet, donc la Politique. L’homme ne vit pas dans l’instant, il vit dans son temps ! La réalité de l'histoire, c'est son présent."

 

Paul Virilio, ici à la Fondation Cartier (Paris) le 26 novembre 2002 (journal Le Devoir Québec), s’est distingué tout au long de sa vie et de ses œuvres par une pensée libre et visionnaire

Quelques extraits et citations proposés sur Babelio, un site consacré à la littérature mais aussi réseau social, permettent d’avoir un début d’éclairage sur l’œuvre gigantesque et visionnaire de Paul Virilio, penseur de l’accélération du monde :

1. Savoir que le monde autour de nous est vaste, en avoir conscience, est un élément de la liberté et de la grandeur de l’homme. La menace, et c'est cela le grand renfermement, c’est d’avoir dans la tête une Terre réduite, une Terre constamment survolée, traversée, violée dans sa grandeur nature, et qui, par là même me détruit, moi l’homme-planète qui n’a plus conscience d’une étendue quelconque. La Terre est devenue trop petite pour le progrès, vecteur du désastre.

2. La globalisation des échanges n’est pas qu’économique. Elle est d’abord écologique et intéresse non pas uniquement la pollution des substances, avec l’effet de serre atmosphérique, mais aussi la pollution des distances et des délais, l’effet de serre dromosphérique.

3. Nous sommes dans une société où le tempo est donné par l'ordinateur. Or, le temps humain n'est pas le temps des machines. Avant, le temps humain, c'était le passé, le présent, le futur. Aujourd'hui, c'est du 24/24, c’est du 7 jours sur 7, c'est l'instantanéité. Ça explique combien il est difficile de vivre, de tout concilier, ça explique les suicides professionnels... Il ne faut pas que le réflexe remplace la réflexion. Il faut se laisser le temps de réfléchir, le temps d'aimer...

4. Aujourd'hui, les nouvelles technologies véhiculent un certain type d'accident, et un accident qui n'est plus local et précisément situé, comme le naufrage du Titanic ou le déraillement d'un train, mais un accident général, un accident qui intéresse immédiatement la totalité du monde. L'accident d'Internet, ou l'accident d'autres technologies de même nature, est aussi l'émergence d'un accident total, pour ne pas dire intégral. Or cette situation-là est sans référence. Nous n'avons encore jamais connu, à part peut-être le krach boursier, ce que pourrait être un accident intégral, un accident qui concernerait tout le monde au même instant.

                                                                                                                Léon-Etienne CREMILLE le 2 novembre 2018