Retour page d'accueil | ||||
A- Consterné par la SITUATION J’écris des articles dans "le Fil du Roubion" qui résultent de mes différentes expériences, familiale, personnelle et professionnelle, de mes lectures, rencontres et réflexions. Je cherche à être clair dans mes propos mais je sais que leur lecture demande un effort de réflexion auquel je vous convie. A1. Agitation humaine et Destruction des biens : Je note d’abord avec effroi que tous les indicateurs vitaux de la planète sont passés au rouge sombre et que notre avenir humain devient incertain. Le réchauffement climatique, dont on ose enfin parler, et l’appauvrissement biologique, que l’on tait encore, ont des effets visibles et inquiétants. Déjà se profile un risque de pénurie alimentaire mondiale ! Et pendant ce temps-là, les voitures vont et viennent de plus en plus nombreuses sur les autoroutes, les avions sont de plus en plus assaillis pour fuir vers des destinations lointaines, les variétés végétales et les espèces animales sont de plus en plus artificialisées et fragilisées. L’agitation humaine est à son comble, au grand dam du climat, de la biodiversité, de la qualité de la vie, de l’avenir de nos enfants.
A2. Agricultures et Pollutions : Comme je l’ai déjà écrit, je suis issu du monde agricole dans lequel j’ai vécu toute ma jeunesse et j’ai œuvré dans les métiers de l’eau durant toute ma carrière. A partir de ces faits, j’ai pu être un témoin de deux évènements concomitants qui sont intervenus durant la seconde moitié du 20ème siècle. J’ai d’abord pu constater dès les années 1960 la diminution progressive, continue et impressionnante du nombre de paysans et la quasi-disparition du monde agricole traditionnel. Ces deux phénomènes majeurs ont été provoqués par l’émergence puis la domination d’une nouvelle agriculture, l’agriculture productiviste. J’ai pu observer par la suite l’apparition et la généralisation des pollutions des eaux, tant souterraines que superficielles, par les nitrates à partir des années 1970 puis par les pesticides dès la l’adoption par le Décret du 3 janvier 1989 de la nécessité de leur recherche et aussi au fur et à mesure de la mise au point de leurs méthodes de détection tout au long des années 1990 et au delà. Je peux affirmer que cette situation ne s’améliore pas et que rien ne bouge dans la réduction des pollutions engendrées par l’agriculture productiviste. J’invite à regarder vers les côtes bretonnes très et toujours aussi défigurées par les algues vertes dues aux excès de production et d’épandage de lisiers. Là-bas est proposée à notre réflexion une visualisation éloquente des ravages que provoquent les pollutions nitratées. Elle devrait aider à notre prise de conscience d’un mal qui sévit partout même si ses effets en sont moins spectaculaires ailleurs parce qu’il affecte le plus souvent les eaux souterraines. Mais au-delà des aspects spectaculaires, d’autres pollutions, sournoises, "rampantes" et terribles manifestent leurs effets sur la santé et sur la vie. Ce sont les pollutions dues aux toxiques, dont certains déversés dans les eaux par l’industrie, tels les PCB dans le Rhône, et d’autres pulvérisés dans les champs par les exploitants agricoles et entraînés vers les eaux, les pesticides. B- Assujetti au LOBBY AGRICOLE Je précise que la profession agricole majoritaire s’est organisé en un lobby très actif et très écouté et qu’elle a plus d’un tour dans son sac pour faire croire qu’elle fait, là où elle n’a pas envie de faire. Ainsi, acculée au début des années 1990 à reconnaître enfin les pollutions des eaux qu’elle a occasionnées depuis les années 1950/60, elle a lancé une opération de conseils auprès des exploitants agricoles, censée réduire les pollutions dues aux nitrates, qui se solde 15 ans après, en 2005, par un échec patent. Tous les acteurs, de l’agriculture comme de l’eau, portent une part de responsabilité dans cet échec. B1. Pratiques agricoles et Pollutions nitratées : Les acteurs de l’agriculture, tant nationaux que régionaux, tant consulaires que syndicaux et techniques, tous ces acteurs, actifs promoteurs de l’agriculture majoritaire, portent la responsabilité principale, celle de ne jamais s’être jamais remis en question, si sûrs de leur vérité. Ils ont établi un programme de lutte erroné, qui est connu sous l’appellation d’opération Ferti-Mieux. Ils ont lancé cette opération à grands coups de communication, poursuivant un autre but que celui de la lutte contre les pollutions des eaux. Ils ont en fait cherché à lutter contre un gaspillage important et de plus en plus inacceptable des fertilisants, les "intrants azotés", épandus en excès sur les parcelles. Ils n’ont donc fait que rationaliser l’apport des engrais azotés synthétiques par le calcul entre ce que la plante a besoin et ce que le sol peut lui fournir. Cette agriculture censée être "moderne" ne "raisonnait" pas ses pratiques de fertilisation, laissait faire, voire encourageait, des pratiques de fertilisation aberrantes. Oui ! Il était temps de s’y mettre à raisonner mais le faire et faire croire qu’il s’agit de lutter contre les pollutions azotées fût une belle erreur qui dure et qui s’est même institutionnalisée. Un réseau agricolo-industriel s’est en effet constitué dans l’année 1993 et a imposé un concept, celui de l’agriculture raisonnée "respectueuse de l’environnement" que des acteurs semblent même considérer comme une étape vers "l’agriculture durable". L’Etat a lui-même entériné le concept. Il a pris, le 25 avril 2002, un Décret relatif à la "qualification" des exploitations agricoles au titre de l’agriculture raisonnée, établissant un Référentiel qui porte sur la maîtrise des risques sanitaires, la santé, la sécurité au travail, le bien-être des animaux mais aussi, bien sûr, sur "le respect de l’environnement". Dans la foulée, il a pris, le 30 avril 2002, un Arrêté qui énonce les 98 exigences nationales de ce référentiel, dont cinq d’entre elles (19 à 23) sur l’"Epandage des fertilisants" [situées dans le chapitre V : Fertilisation minérale et organique]. Il faut savoir que l’application d’aucune des cinq n’a d’effets significatifs sur l’amélioration de la qualité des eaux. Ce Référentiel est tout simplement un Code de déontologie de l’agriculture productiviste qui manquait alors gravement mais il n’est en aucune façon un programme d’actions contre les pollutions.
B2. Communication et Confusion : Toutes les initiatives prises sont basées sur des techniques de communication et elles déroutent ou trompent beaucoup de monde, y compris des exploitants et des techniciens agricoles, qui pensent sincèrement que la lutte contre les pollutions est en en bonne voie et qui s’activent courageusement sur le terrain. Il faut donc cesser d’entretenir la confusion, de dépenser inutilement beaucoup d’énergie, et surtout de faire croire au grand public que l’agriculture raisonnée est la solution aux problèmes de pollutions des eaux. La désillusion est là, au bout du chemin. B3. Inaction et Inefficacité : Les acteurs de l’eau portent eux aussi une responsabilité importante dans l’échec de la lutte, celle d’être restés inactifs, inertes, face à toutes les opérations menées par le monde agricole. Ils n’ont pas su imaginer qu’ils avaient leur propre partition à jouer. Ils n’ont pas développé les connaissances suffisantes sur le fonctionnement des cycles naturels. Ils n’ont pas été sur le terrain pour comprendre les rythmes biologiques de la terre. Ils n’ont pas mis en chantier l’élaboration des concepts adéquats. Ils se sont contentés hélas d’adopter une attitude et une logique d’accompagnement des opérations inventées par l’agriculture industrielle sans la curiosité d’aller chercher où se situe l’origine des pollutions. Ils ont failli à une mission essentielle de "diagnostic" des vraies causes des pollutions des eaux sans laquelle il n’est pas possible de définir des moyens d’actions efficaces. Certes ! Il y eut des diagnostics "à la pelle" mais ce ne furent jamais les bons ! Et ça continue sur cette fausse piste. L’indispensable prise de conscience sur la vraie nature des pollutions diffuses est à faire. C- Concentré sur le PROCESSUS J’ai moi-même accompagné avec ardeur les opérations de conseil aux agriculteurs qui tout au long des années 1990 ont levé beaucoup de bonnes volontés parmi les conseillers et les exploitants agricoles. J’ai assisté aux réunions des comités de pilotage, participé aux démonstrations sur le terrain, partout où les nappes d’eau du bassin Rhône-Méditerranée & Corse étaient atteintes par la pollution azotée et où une opération avait été déclenchée. J’ai progressivement perçu que les trajets hydriques des polluants azotés n’étaient jamais formulés et que l’on se contentait de rester dans le cadre trop étroit d’une approche agricolo-agricole. J’ai peu à peu senti monter en moi un malaise dû à ce que la prise en considération du phénomène des pollutions diffuses ne faisait pas partie des opérations en cours. J’ai alors compris que l’on se trompait et que nous allions vers l’échec mais que personne ne semblait percevoir cette situation, enfermé dans ses conceptions de la production agricole. Retour page d'accueil |
||||